Nous rencontrons Clara Crochemore, ancienne journaliste pour Marie France, aujourd’hui rédactrice web dans la mode et les projets éco-responsables. Nous avons souhaité vous partager son parcours inspirant et son « adieu » à la fast fashion. Découvrez comment est-elle devenue rédactrice web pour des projets éthiques et positifs !

Changement de journaliste mode à rédactrice web mode éco responsable éthique, quel a été ton déclic ?

Je dirais qu’il s’agissait plus d’un processus qu’un déclic. J’ai commencé à changer mes habitudes timidement. En remplaçant mes produits ménagers, en essayant d’utiliser moins d’emballages, etc.

La mode est arrivée beaucoup plus tard ! En tant que journaliste mode, je ressentais un malaise de plus en plus important que j’avais du mal à identifier. Le ballet incessant de « nouveautés », les tendances, les « must-have » : tout cela commençait à manquer de sens pour moi. Tout allait trop vite, une effervescence pas forcément justifiée à mon sens. Je commençais à être mal à l’aise avec le fait de mettre en avant certaines marques, et, à travers mes articles, d’inciter à consommer toujours plus (les sélections shopping, les soldes etc.).

Clara Crochemore
Clara Crochemore, rédactrice web mode éco responsable

Je savais que les dessous de la mode n’étaient pas reluisants, mais je dois avouer que j’avais peur de ce que j’allais trouver en grattant la surface… je me suis donc voilée la face pendant un moment. Et s’il faut parler de déclic, je dirais que c’est le documentaire The True Cost d’Andrew Morgan qui a marqué un tournant. Beaucoup de personnes ayant tourné le dos à la fast fashion en parlent d’ailleurs comme d’un déclencheur.

Après l’avoir vu, ce documentaire ne me quittait plus. Il montre à quel point la filière du vêtement est complexe et opaque. J’ai ensuite ouvert les yeux sur beaucoup de choses, et je dois avouer que ça me paraissait un peu vertigineux. A partir de quand peut-on vraiment dire qu’un vêtement est éco-responsable ? Il y a la question de la matière première, de la fabrication, du tissage, de la teinture, mais aussi de la pollution engendrée par le lavage et par la fin de vie du vêtement. Et bien sûr la question sociale, celle du respect et du bien-être des travailleurs. Chaque alternative comprend ses avantages et ses inconvénients. La première solution, en réalité, c’est de moins acheter.

Malgré cette prise de conscience, je continuais à commander chez Mango, Zara… j’avais du mal à résister. Il y a eu un décalage entre la prise de conscience et le moment où j’ai décidé de revoir mes habitudes ancrées depuis des années et de changer radicalement ma manière de « consommer » et de considérer le vêtement. En parallèle, cela faisait un moment que je ne me sentais plus alignée avec les valeurs de mon entreprise. J’ai donc décidé de prendre un nouveau départ en me lançant en freelance. Et cette fois, en mettant tout ce que j’avais appris au service des petites marques qui essaient de bien faire les choses. Cela a entraîné des rencontres passionnantes ! C’est un bonheur d’entendre des créateurs et entrepreneurs parler de leurs aventures et de les soutenir.

Rédactrice web mode éco responsable et pollution numérique, comment choisir ?

Très bonne question ! La pollution numérique est en effet un vrai problème. Surtout qu’étant immatérielle, il est plus difficile d’en avoir conscience. La rédaction d’articles, les réseaux sociaux, les newsletters : chacun engendre de la pollution numérique, de façon plus ou moins élevée. Ils sont pourtant essentiels pour une entreprise, surtout si elle est uniquement présente sur le digital. En effet, cela permet d’engager un vrai dialogue avec sa communauté et de se développer. Difficile donc de choisir entre les deux !  Il n’y a pas là non plus de solution parfaite. Selon moi, le mieux est de trouver l’équilibre pour publier moins, mais mieux. Sans perdre de vue les exigences des algorithmes qui demandent une certaine régularité pour pouvoir être visible. Cela passe par le fait d’éviter de publier uniquement pour publier et essayer d’apporter quelque chose de nouveau.

Au niveau articles, il ne faut pas hésiter à créer des articles de fonds, à y ajouter votre point de vue, votre expertise et votre personnalité. Ce seront des articles vraiment lus, utiles pour les lecteurs et vos clients, et qui permettront de créer un vrai lien. Demandez également à vos clients ce qu’ils aimeraient lire, les questions qu’ils se posent pour y répondre en article. Les blogs d’Atelier Unes et de Loom, appelé La mode à l’envers sont par exemple très intéressants. Ces marques créent peu d’articles, mais quand elles le font, ils sont toujours pertinents.

Quel conseil donnerais-tu à une marque éco-responsable qui souhaite développer sa communication ?

Le travail de rédaction et de communication peut-être à double tranchant. En voulant travailler les mots, faire des phrases accrocheuses, on peut sans le vouloir donner une impression de marketing creux, voire pire, de greenwashing, même quand ce n’est pas le cas. Il est donc important de bien vérifier les mots, s’assurer que le sens qui se dégage correspond bien au projet. Et surtout, être transparent. C’est impossible de tout faire parfaitement quand on est une entreprise qui démarre, mais c’est important de le dire à ses clients, de rester précis et de ne pas les induire en erreur.

Quels sont les critères les plus importants pour toi dans le choix de tes collaborations ?

Il y a plusieurs critères qui entrent en jeu : mes convictions, le goût du challenge, les opportunités croisées sur mon chemin… et naturellement la question financière, parce que lorsqu’on se lance en tant que freelance, on n’a pas toujours l’occasion de pouvoir choisir et il faut payer ses factures. Concernant les projets autour de la fast fashion : je les refuse, parce que je ne veux vraiment plus alimenter ce système. Ensuite, je peux accepter une mission parce que cela représente un défi. Toutes mes collaborations ne concernent pas le domaine éco-responsable – même si je veille à ce qu’elles restent cohérentes avec mes valeurs. Enfin, et surtout, j’aime accompagner les entrepreneurs passionnés et sincères dans leurs démarches. C’est un vrai moteur de participer à des projets nourris par de vraies convictions.

Intervieweure : Mélody Rousset

Interviewée : Clara Crochemore, retrouvez son site web ici